Après les six clubs anglais, les trois clubs italiens impliqués dans la Super Ligue renoncent au projet. Ils reconnaissent que la compétition, dans sa nouvelle version et dans la forme sous laquelle elle a été initialement conçue, avait désormais « peu de chances » de voir le jour. Le retrait de la quasi-totalité des clubs impliqués n’a pas pour autant empêché les clubs italiens de continuer de prôner une évolution du football mondial. En quelques jours, les fondateurs de la compétition «privée» et rivale de la Ligue des champions se trouvent impuissants face aux menaces des instances du football, mais également aux protestations des supporters.
L’exigence du haut niveau, consolante pour certaines équipes, désolante pour d’autres, satisfaisante ou décevante, reste cependant un bon sujet de réflexion autour du football. La santé financière des clubs s’est fortement dégradée. L’inflation, en temps de Covid, s’est répercutée sur toute la structure du marché du football, de surcroît par des moyens financiers en constante progression. Mais aussi et surtout par une gestion des ressources le plus souvent mal orientée.
Il faut dire que tout ce qui entoure le sport roi s’est transformé en une obsession financière incontournable et qui occulte tout le reste. La compétition, la recherche de la performance, les objectifs économiques, parfois même politiques, caractérisent ainsi mieux le football tel qu’on le vit actuellement. Loin des pratiques régulières, sa gestion est devenue complexe. Elle repose sur un niveau d’exigence très élevé. On pense à l’argent, au financement, mais l’on oublie qu’il suppose une intendance, une comptabilité et des considérations particulières. S’il est impossible aujourd’hui de faire revivre l’aspect amateur, on réalise que le football n’est plus cet exutoire de passions collectives et on se dit que, faute de pratiques raisonnables et modérées, on se trompe de plus en plus sur les priorités, les tenants et les aboutissants.
Il est évident que, dans un environnement forcément exceptionnel, le football ne cesse de souffrir des changements artificiels. Il est fortement intégré dans la sphère économique. Il est soumis à tous les aléas et contraintes. De nouvelles pratiques ont vu le jour et ont contribué à entretenir une spirale inflationniste. D’ailleurs, ce qui a été entrepris à travers les différentes étapes par lesquelles il est passé s’est avéré inadapté, dénué et incomplet. Les clubs qui arrivent à s’y faire une place ont compris que les dispositifs liés aux approches et aux stratégies ont changé. Ils ont compris que le football et toute l’activité sportive n’ont plus la même signification. Ceux qui sont dans le bain depuis longtemps ont quelque part réussi à ajuster leurs convictions et leurs connaissances en fonction des nouvelles évolutions. Mais la majorité écrasante des clubs ne parvient plus à faire face à un univers qui ne sait plus se montrer raisonnable en termes de finances. Les rappels à l’ordre ne semblent pas convaincre les différentes parties prenantes. Encore moins constituer une solution pour remettre les choses à leur place réelle au point que les différents dérapages enregistrés au fur et à mesure sont considérés comme un fait ordinaire, tandis que le caractère prétendument exemplaire du football est ouvertement contredit.
La spirale a pris ainsi une nouvelle signification. Le football n’est plus une référence de jeu et de terrain, mais plutôt de rémunération et de compte bancaire. Lorsqu’on soulève le couvercle du football mondial, on ne peut se retenir devant la vertigineuse progression des salaires des joueurs au moment où la plupart des clubs sont frappés du sceau des dépenses démesurées et effrénées. L’accentuation d’un dualisme sur le marché des transferts a engendré deux catégories. Celle des stars et celle des joueurs, certes professionnels, mais ordinaires.
L’impératif serait aujourd’hui d’assurer un certain équilibre pour que l’accroissement exponentiel de l’argent circulant dans le football ne puisse pas masquer une autre réalité. La plupart des clubs dans le monde entier ont une masse salariale supérieure à leur chiffre d’affaires. Depuis qu’ils avaient commencé à être touchés par le déséquilibre financier, beaucoup de voix s’étaient élevées pour plaider pour la nécessité d’un encadrement plus étroit, pour l’amélioration de la transparence et de la traçabilité des comptes des clubs, des indemnités des transferts et du plafonnement de la masse salariale des joueurs.